« Ne prétendons pas que les choses vont changer si nous continuons à faire la même chose. La crise est la plus grande bénédiction qui puisse arriver aux gens et les pays parce que la crise apporte des progrès. La créativité naît de l’angoisse comme le jour vient de la nuit noire. C’est dans la crise que l’invention est née, les découvertes et les grandes stratégies. »

C’est sans surprise que nous nous appuierons sur cette citation attribuée à Albert Einstein pour restituer les échanges internes et avec les partenaires qui se sont associées à notre réflexion engagée à la suite de la pandémie.

« Innovons avec les parents pour faire face à la pandémie ! ». Tel a été l’objet de nos échanges.

A l’annonce du confinement nous avons tenté ensemble de répondre aux questions : comment allons-nous fait face à cette crise sanitaire qui nous chamboule « émotionnellement » et nous impose de cesser brutalement notre activité au détriment du lien parent-enfants déjà fragile

Comment et avec quels moyens allons-nous assurer une continuité du service ?

Comment allons-nous organiser notre retour tout en impliquant les parents dans le processus ?

Le 15 mars 2020, à l’annonce du confinement, se font ressentir, aussi bien chez les professionnels d’espace rencontre que chez leurs dirigeants, des sentiments d’incertitude, de solitude, de frustration voire d’angoisse.

Bien que les communications soient restreintes du fait du distanciel et de l’annonce inopinée du confinement, nous avons mis tout en oeuvre pour rester en lien avec les familles et adapté notre activité à l’état de crise, et ce dans le respect des besoins des enfants et des parents.

Nous avons dans un premier temps, le 16 mars, téléphoné à toutes les familles afin de les avertir de la suspension des rencontres.

Certaines familles venant chercher notre soutien au travers du téléphone portable, nous avons décidé de créer une adresse courriel spécifique à l’échange parent-enfants durant cette période et avons averti tous les parents de cette possibilité.

Un maintien du lien avec les familles au travers de cet outil c’est donc instauré, mais aussi au travers d’entretiens téléphoniques et ce afin de favoriser une transmission régulière d’information. Tout ceci avec une logistique moindre et un financement incertain ayant entraîné des mesures du chômage partiel pour la majorité des salariés.

« C’est dans la crise où chacun doit donner le meilleur de soi-même, parce que sans crise tout vent est caresse ». Citation probablement attribuée à Einstein.

Si nous voulions jouer notre rôle de soutien, il fallait agir en nous appuyant sur les nouvelles technologies. Ce constat était vrai lors du confinement mais également à sa sortie en mai pour les personnes vulnérables, venant de loin…

Ainsi, nous avons assisté à l’émergence d’un nouveau mode d’intervention qui indéniablement risquait de transformer notre pratique. Des visites et des entretiens à travers les nouveaux
outils informationnels et communicationnels (visites et entretiens de soutien psychologiques en Visio, transmissions de photos et de vidéos aux parents). Mais ce mode d’intervention a mis le doigt sur les inégalités face à ces outils qui ne sont pas accessibles à tous les parents.

Nous avons alors dû les combattre en faisant preuve d’imagination pour arriver à convertir les différents supports afin de les rendre accessible à l’autre parent.

Ce mode va introduire des changements dans notre perception du lien parent-enfant ainsi que notre rapport aux usagers, l’ordinateur étant un objet déjà introduit dans l’espace de négociation de la vie familiale. Grâce ou à cause de la crise il s’introduit aujourd’hui de fait, dans l’espace des négociations professionnelles. Se pose alors, la question de sa place dans notre intervention aujourd’hui et comment, en citant peut-être Albert Camus (origine de la citation non déterminée), « enraciner notre futur à partir de là où nous sommes » ?

Favoriser pour des raisons bien précise les e-espaces de rencontre est donc devenu possible. Les e-espaces de rencontre sont même maintenant inscrit dans le nouveau référentiel national.

Toutefois nous devons veiller à ne pas parler d’e-familles et questionner sans cesse ces e-rencontres afin qu’elles ne se substituent pas aux rencontres en présentiel au sein de l’espace de rencontre. Comme à chaque fois la question qui s’impose à nous est : Quels sont les effets sur les liens familiaux ?

Face à cette pandémie nous avons dû imposer notre volonté, auprès des partenaires, pour continuer à travailler la responsabilisation parentale. En effet, nous avons résisté à fournir aux parents des masques (sauf en cas d’une demande de leur part à la suite d’un oubli) et leur avons demandé de s’approprier davantage leur droit de visite puisqu’ils ne pouvaient plus bénéficier d’une mise à disposition de nos jeux et de notre coin cuisine. Parents et enfants ont su s’adapter rapidement, et ce bien que conscient que cela refrenait leur droit et/ou l’évolution possible de leur relation. Restituer à chacun sa place prend encore plus de sens dans ce
moment de crise ou le conflit est exacerber : ne pas restreindre autrui à la peur de la contamination ; reconnaître chaque parent comme un être responsable faisant parti de la vie de l’enfant. Durant ces mois de pandémie, nous avons expérimenté de nouvelles méthodologies, mais avons toujours eu à coeur d’oeuvrer dans le respect des places de chacun.

Kadhidja Zitouni (ER SOS aide aux habitants) & Karine Bour (ER Le Creuset)