Texte original écrit en 2010 sous le titre « La place de l’enfant dans la société d’hier et d’aujourd’hui ».

Lors de certains passages, nous sommes parfois amenés à devoir forcer un enfant à aller vers son autre parent. Aucun professionnel ne fait cet acte sans s’interroger, sans être indifférent aux larmes et aux refus tant de l’enfant que du parent, voire des deux parents.

Manifestement les parents n’arrivent pas, ou plus, à se poser en tiers faisant l’autorité. Depuis que l’espace rencontre Le Creuset existe, nous avons constaté que la place de l’enfant a changé au sein des familles.

Aujourd’hui | 2010…

Les parents n’envisagent pas de forcer leur enfant, même dans le but de respecter une décision judiciaire, nous objectant de respecter le désir projeté sur l’enfant.

L’enfant est mis en place d’adulte avec un savoir égal à celui de ce dernier. Les parents encouragent son expression, évitant toute frustration de peur que l’enfant ne puisse plus s’épanouir ou que cela brime son potentiel de développement.

Autrefois…

L’enfant était considéré comme un mini-adulte qu’il fallait éduquer et lui donner un enseignement afin qu’il fasse parti d’un tout (la famille, la société… ). L’enfant se construisait au travers des adultes et de ses pairs. De ce fait, le parent faisait en sorte que l’enfant se conforme à la société. Il avait pour cela recours à l’éducation et à ses croyances. (Voir cet article du Dr Bernard Fourez, psychiatre).

L’idée qu’aujourd’hui l’enfant naît « avec tout en lui » et non « qu’il va se nourrir de l’autre » enlève la dynamique éducative, aléatoire et divine. Si un enfant avait des difficultés, par le passé les parents partaient du principe que le problème venait de la nature, du caractère, du destin… Nous étions dans un système hétéronome où le parent ne portait pas l’action. Aujourd’hui, nous sommes dans un système autonome où l’on part du principe que chacun se construit lui-même. Par conséquent, l’enfant en difficulté est pensé « nul ». Les parents

Le parents, tout comme l’enfant, vont se reprocher ce qu’il devient. Ce phénomène d’auto-reproche est déstructurant puisqu’il va entraîner l’inaction. Quand l’enfant pensait se construire au travers des autres, ses difficultés le faisaient culpabiliser. Et cette culpabilité l’entrainait dans une progression car l’enfant, par exemple, se promettait d’écouter mieux la prochaine fois. Ainsi le parent a peur que l’on « casse » son enfant et n’hésite pas à intervenir et à défier.

Prenant en compte cette individualisation et ce désir de séduction, les comportements et habitudes, modes de vie changent. En effet, pour exemple, il n’est pas rare qu’une famille se réunisse lors d’un même repas autour de plats différents pour chacun.

La famille est de moins en moins socialisante. On ne fait plus pour tous mais selon chacun. L’individu élevé dans la société actuelle développe alors « une personnalité narcissique assertive » selon le psychiatre Daniel Marcelli. Il reste avec la pensée que « mon droit est mon droit et la société doit faire avec » et ainsi, il donne toute légitimité à ses pulsions.

Des liens re-questionnés

Le lien conjugal était avant le lien par lequel se créait une identité sociale. Celui-ci faisant défaut, c’est à travers leurs enfants que les adultes trouvent aujourd’hui leur identité sociale, faisant peser une lourde tâche sur leurs épaules.

Dans un contexte tel que le nôtre où est re-questionné en plus le lien parent-enfant, quand les parents nous opposent ce que serait le désir de l’enfant là où devrait se trouver leur responsabilité parentale, il arrive de plus en plus souvent des passages à l’acte.

Illustration de l’article tirée de la première de couverture du livre du Dr Daniel Marcelli « Moi je ! De l’éducation à l’individualisme » 2020 Éditions Albin Michel.